Choléra à Mayotte, rapport de mission

Professeur Renaud Piarroux
Institut Pierre Louis d’Epidémiologie et de Santé Publique, INSERM, Sorbonne Université
Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris

Depuis janvier 2024, une épidémie de choléra sévit aux Comores, principalement sur l’île d’Anjouan, avec déjà 5287 cas et 113 décès à date. À Mayotte, les premiers cas ont d’abord été importés, mais depuis le 21 avril, des cas autochtones ont été détectés. Au total, 96 patients ont été recensés en moins de cinq semaines (79 cas autochtones et 17 importés). La densité de population élevée, les conditions de vie précaires et la mauvaise desserte de certains quartiers en eau potable ont favorisé cette propagation rapide.

Pour la période allant du 15 au 21 mai, 15 nouveaux cas ont été recensés, principalement dans les communes M’Tsangamouji, de Mamoudzou et de Koungou. Sur l’ensemble de la période épidémique, le quartier Kierson à Koungou a représenté le foyer principal. Les principaux facteurs de risque incluent l’eau contaminée par des matières fécales infectées, les conditions de vie précaires et le manque d’infrastructures sanitaires adéquates. À Mayotte, de nombreux quartiers n’ont pas accès à l’eau potable et utilisent des cours d’eau à haut risque de contamination, exacerbant ainsi la transmission de la maladie.

La lutte contre le choléra nécessite donc prioritairement un accès à de l’eau potable; des rampes d’eau et des bornes fontaines doivent être installées dans les quartiers les plus touchés. La promotion de bonnes pratiques d’hygiène, comme le lavage des mains, est fondamentale, mais difficile à appliquer sans accès suffisant à l’eau. Dans ce contexte, il est crucial de maintenir les activités de lutte mises en place (investigations, désinfection des logements, maraudes, recherche active de cas…) et même d’intensifier les campagnes de vaccination ciblées dans les zones affectées par le choléra.

Le scénario épidémiologique le plus probable envisage une épidémie fluctuante avec des accès sporadiques entrecoupés de périodes d’accalmie. Il existe un risque de multiplication des foyers en l’absence de mesures adéquates, tandis que l’élimination rapide du choléra est un objectif atteignable si les mesures de lutte sont intensifiées. Pour interrompre l’épidémie, il est indispensable de renforcer l’accès à l’eau potable, d’obtenir la confiance des populations et d’intensifier les campagnes de sensibilisation et de vaccination dans les quartiers touchés. À moyen terme, assurer un accès durable à l’eau potable sera essentiel pour éviter la réintroduction du choléra. Le renforcement des capacités médicales, notamment en améliorant les infrastructures de santé et en attirant des professionnels de santé, est également crucial pour répondre aux besoins sanitaires.

En conclusion, l’épidémie de choléra à Mayotte nécessite une réponse multisectorielle rapide pour interrompre la transmission et prévenir de futures épidémies. L’accès à l’eau potable, les pratiques d’hygiène et le renforcement des capacités médicales sont essentiels pour maîtriser et éliminer durablement le choléra.

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