La problématique spécifique de l’accès à l’assainissement a longtemps été reléguée derrière celle de l’accès à l’eau potable.
De nombreux textes internationaux évoquent l’assainissement (sanitation en anglais) mais la compréhension de ce qu’il recouvre est l’objet de débats confus. Fait-il référence à l’accès aux toilettes ou au traitement des eaux usées et des eaux de ruissellement ?
Selon les textes, il est question d’assainissement amélioré, d’assainissement de base, satisfaisant, adéquat ou encore d’assainissement total. Cette floraison de terminologie donne lieu à diverses interprétations qui ne facilitent pas la mise en oeuvre d’actions concrètes dans le domaine de l’accès à l’assainissement.
Un grand progrès a été accompli au Sommet de Rio+20 où le concept plus précis d’eaux usées est apparu. Néanmoins, l’assainissement souffre d’un manque de définition claire de son contenu qui influe sur la mise en oeuvre des obligations liées à ce service essentiel.
Si la communauté internationale a défini un objectif sur les toilettes, elle n’en a fixé aucun sur la gestion des eaux usées, comme c’est le cas en Europe. Nombre de gouvernements dans les pays dits en développement souscrivent à des engagements en matière d’assainissement en pensant uniquement aux déchets humains, ce qui est indispensable, mais ne prend pas en compte les déchets agricoles et industriels.
Nous sommes aujourd’hui encore très éloignés de ce que doit recouvrir un service d’assainissement complet, c’est-à-dire l’évacuation, le transport, le traitement des eaux sales. le degré de recyclage des déchets traités et la restitution envisageable de la part non recyclée dans le milieu naturel.
Si la garantie de l’accès à une eau pure en tant que droit fondamental de l’homme figure dans la déclaration sur les Engagements du Millénaire en 2000, ce n’est que deux ans plus tard, au Sommet de la Terre de Johannesburg en 2002, qu’une nouvelle cible sur l’assainissement apparaît.
Entre 2002 et 2006, les progrès restent lents, à l’exception de l’Afrique du Nord. Le Rapport 2006 de l’OMS atteste qu’entre 1990 et 2006, le nombre de personnes ne disposant pas de l’assainissement de base n’a diminué que de 98 millions. Le taux de couverture progresse systématiquement plus lentement dans les zones rurales que dans les zones urbaines. Toutefois, dans la plupart des pays dits en développement, l’exode vers les villes, conjugué à la croissance naturelle de la population urbaine, due à la pression démographique, accroît le nombre de citadins non desservis.
Une avancée symbolique a eu lieu en 2008 avec la proclamation par les Nations Unies de l’année internationale de l’assainissement. Elle a permis de mettre un coup de projecteur sur les efforts faits par certains pays et de lancer plusieurs initiatives cherchant à résoudre la crise mondiale en matière d’assainissement, dont la création d’un Groupe de travail de l’ONU-Eau sur la question de l’assainissement.
L’agenda 2030 des Nations Unies, adopté en 2015, a pris acte du rôle central de l’assainissement dans le développement durable et a adopté un Objectif dédié. La vision intégrée du nouveau Programme permettra de mieux appréhender les liens entre les composantes du développement.
« l’Appel à l’action en faveur de l’assainissement a été lancé en 2013 et nous nous sommes fixé comme objectif de mettre un terme à la défécation à l’air libre d’ici à 2025. (…) »
Ban Ki Moon, secrétaire général des Nations Unies. Novembre 2015
Le 28 juillet 2010, les Nations Unis reconnaissaient officiellement l’accès à l’eau et à l’assainissement en tant que droits fondamentaux des personnes. Cette reconnaissance a été complétée en septembre 2010 par une résolution du Haut-commissariat des Droits de l’homme, à Genève, définissant les moyens à mobiliser, le cadre juridique et la responsabilité des Etats face à ce nouveau droit, et complétant ainsi les conclusions de Catarina de Albuquerque, experte indépendante des Nations Unies, sur la nécessité de faire de l’accès à l’assainissement non seulement un impératif des Droits de l’homme, mais un Droit de l’homme distinct en lui-même.
Le 21 novembre 2013, la résolution adoptée par consensus à l’Assemblée générale des Nations Unies a redonné un nouveau signal politique fort en faveur du droit à l’eau. Il existe désormais un acte juridique international qui prouve la reconnaissance du droit à l’eau et à l’assainissement au niveau international. Il revient aux pays membres de le ratifier à leur échelon.
Le 17 décembre 2015, l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté une résolution qui reconnait pour la première fois la distinction entre le droit à l’eau et le droit à l’assainissement. « Le droit de l’homme à l’assainissement doit permettre à chacun, sans discrimination, physiquement et à un coût abordable, d’avoir accès à des équipements sanitaires, dans tous les domaines de la vie, qui soient sans risque, hygiéniques, sûrs, socialement et culturellement acceptables, qui préservent l’intimité et garantissent la dignité ». S’il s’agit d’un pas important dans la reconnaissance de ce service essentiel, l’assainissement doit encore être reconnu en tant que filière complète de collecte et de gestion des eaux usées, qui ne se limite pas à l’installatoin de toilettes.
(Re)sources, qui a porté et défendu le thème du droit à l’eau et à l’assainissement sans relâche depuis sa création, salue cette reconnaissance en tant que première étape contribuant à accroître la pression sur les Etats.
* Les droits à l’eau et à l’assainissement doivent être indissociables. La reconnaissance d’un droit à l’eau prévoit les moyens de reconstituer la ressource. Elle est donc inséparable d’une préoccupation environnementale et climatique de long terme.
* C’est un droit global – eau et assainissement – au cœur du droit à la santé qui implique d’améliorer, à la fois, l’accès, l’usage et le rejet.
* Si le contenu du droit à l’eau est précisé – l’eau doit être potable, accessible, disponible, d’un coût abordable et fournie sans discrimination, le droit à l’assainissement nécessite une définition précise de ce que recouvre « l’assainissement », afin qu’il puisse avoir un contenu réel et devienne une réalité. Un effort de volonté politique doit être fourni de mise à disposition de moyens financiers et de participation publique sans commune mesure avec le peu qui est réalisé aujourd’hui.