Espérance de vie : le monde est revenu près de dix ans en arrière
L’indice de développement humain (IDH) a reculé pour la première fois, tiré vers le bas par l’impact du Covid sur l’espérance de vie. Mais c’est surtout l’accumulation de crises aiguës qui inquiète : le sentiment d’insécurité polarise les sociétés et entrave l’action collective.
Pour la première fois, l’indice de développement humain (IDH) recule dans le monde. L’indicateur, qui combine l’espérance de vie en bonne santé, le niveau de connaissances des jeunes adultes et le niveau de vie de la population, n’avait cessé de progresser depuis sa création en 1990. Mais trente ans plus tard, il décroche. Non seulement l’indice a reculé pendant deux années consécutives (2020 et 2021), mais si brutalement qu’il est retombé à son niveau d’il y a cinq ans.
« Un ensemble d’incertitudes s’accumulent et interagissent pour perturber la vie de manière inédite », constate le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), qui calcule chaque année cet indice. « Les crises mondiales se cumulent : crise financière, la crise climatique qui se poursuit, la pandémie de Covid-19 et une crise alimentaire qui s’annonce », indique le rapport. L’indicateur s’arrêtant à la fin d’année 2021, l’impact de la guerre en Ukraine n’est pas encore pris en compte…
L’impact de la crise sanitaire
C’est en fait l’espérance de vie qui tire l’indice vers le bas – le niveau d’instruction et le niveau de vie progressant, eux légèrement. En deux ans, l’espérance de vie à la naissance est passée de 72,8 ans à 71,4 ans l’an dernier. Elle retombe ainsi à son niveau de 2013.
Les pays les plus affectés par la pandémie de Covid-19 avaient en effet publié l’an dernier des chiffres en fort recul. Aux Etats-Unis, les statistiques publiées le mois dernier confirment encore ce recul : l’espérance de vie est désormais à son niveau de 1996. En France, elle s’est légèrement redressée après un net recul en 2020.
La majorité de la planète est concernée par le recul de l’IDH : 90 % des pays du monde ont enregistré un recul en 2020 et/ou 2021, selon les calculs de l’agence onusienne. Mais alors que l’indice a commencé à se redresser la deuxième année dans les pays les plus développés, le recul a continué ailleurs, creusant encore les inégalités.
Insécurité et polarisation
Au-delà de la crise sanitaire, le rapport alerte sur le sentiment d’insécurité qui gagne du terrain dans la majorité des pays, y compris les plus développés. Or « la façon dont l’insécurité et la polarisation s’alimentent mutuellement aujourd’hui » est un facteur majeur identifié par le PNUD pour expliquer le manque de solidarité et la paralysie collective face aux défis majeurs comme la crise climatique. « De nouveaux calculs montrent, par exemple, que ceux qui se sentent le moins en sécurité sont également plus susceptibles d’avoir des opinions politiques extrêmes », souligne l’agence.
Pour sortir de l’impasse, le rapport recommande une politique résumée par trois « i » pour « invest, insure, innovate » : investir dans les énergies renouvelables et la préparation aux pandémies ; assurer, notamment par la protection sociale, pour préparer les sociétés aux incertitudes prochaines ; et innover sous toutes ses formes (technologique, économique, culturelle) pour répondre aux futurs défis.
Source : Les Échos