«Le sommet Finance en Commun, un sommet de plus ou une vraie première?» – La tribune de Patrice Fonlladosa
« Il y a ici l’opportunité de créer de véritables alliances entre les différents acteurs du financement des infrastructures et des services de base »
Les Faits – Patrice Fonlladosa est président de (Re)sources et président Afrique du Centre d’étude et de prospective stratégique (CEPS)
Annoncée il y a déjà plusieurs mois, et passée relativement inaperçu dans le champ médiatique, la réunion à Paris du sommet mondial des banques de développement mi-novembre (Finance in Common Summit) va voir plus de 450 établissements financiers réfléchir et proposer des modes d’action pour « prendre soin des vivants de façon résiliente ».
Le fait est suffisamment exceptionnel pour être mis en avant. Il est le fruit d’une réelle prise de conscience provoquée par la crise sanitaire et économique que nous continuons de traverser, et que nous pensions – à tort – avoir franchi il y a quelques semaines encore. Lorsqu’on représente 2 500 milliards d’investissement annuel dans le monde et plus de 10 % du volume global desdits investissements, dialoguer et chercher les solutions d’une meilleure coordination pour imaginer les voies et moyens d’une relance économique aux impératifs écologiques et humains est crucial.
Pour autant, si l’initiative mérite effectivement d’être soutenue, elle n’empêche pas de rester vigilant sur les conditions d’exercice – privilégier la finance climatique, l’impact sanitaire ainsi qu’une promotion intelligente des droits humains. Car jusqu’alors, les banques en question ont principalement bâti des stratégies de moyen long terme en isolement les unes des autres, avec des priorités segmentées et parfois même des géographies plus abandonnées pour cause d’analyse de risque décalée.
Plusieurs termes nouveaux apparaissent dans la préparation de ce sommet : la notion de « coalition financière », « d’intégration de projets » ainsi que l’affirmation du caractère contra-cyclique des programmes face à la frilosité très prononcée du secteur bancaire commercial traditionnel
Crises permanentes. Plusieurs termes nouveaux apparaissent dans la préparation de ce sommet : la notion de « coalition financière », « d’intégration de projets » ainsi que l’affirmation du caractère contra-cyclique des programmes face à la frilosité très prononcée du secteur bancaire commercial traditionnel. On évite aussi certains mots (« croissance ») au bénéfice d’autres (« prospérité ») ; on efface progressivement la notion éculée de « développement ». Et il ne s’agit pas de mode, mais bien de recherche de solutions nouvelles qui répondent à des demandes locales ou nationales – et non plus de transfert de modèles. Ecouter et non plus instruire, adapter et non plus dupliquer. Il y a donc ici l’opportunité de créer de véritables alliances entre les différents acteurs du financement des infrastructures et des services de base.
C’est un pari osé, dont les résultats seront analysés et certainement très commentés. Il est heureux que la France soit à l’origine de ce premier sommet, mais c’est bien l’histoire d’une union qu’il convient maintenant d’écrire face aux enjeux financiers considérables pour un maximum d’impact dans les situations de crise devenues permanentes.
Patrice Fonlladosa est président de (Re)sources et président Afrique du Centre d’étude et de prospective stratégique (CEPS).
Source : L’Opinion